La semaine pour l'emploi
des personnes handicapées s'ouvre ce lundi. Malentendante, Gelika revient sur
ses études, sa carrière d'ingénieure et les obstacles qu'il reste Ã
lever.
"Je crois que les plus gros obstacles à l'emploi
des personnes handicapées sont la méconnaissance et les préjugés."
Flickr/Warrenski
Je suis malentendante depuis mon
enfance, ce qui ne m'a pas empêchée de poursuivre mes études, car j'ai été
appareillée des deux oreilles dès l'âge de 10 ans. Ayant une surdité évolutive,
j'ai pu suivre une scolarité "normale".
J'ai eu des facilités pour les matières qui s'écrivent au tableau comme les
mathématiques et les sciences. Les matières littéraires ont été plus
compliquées, même si j'ai appris par exemple les langues par la lecture.
Ingénieure chez STMicroelectronics, Gelika a participé
à l'élaboration du guide Réussir l'intégration des
personnes handicapées (RITHa), réalisé par des salariés à partir de
leur propre expérience.
Je voulais faire des maths et suis donc allée en
classe préparatoire pour éviter les amphithéâtres trop bruyants. J'ai passé des
concours et intégré l'Ensimag, une école d'ingénieurs en informatique. J'ai
suivi ma 3e année en Allemagne, puis j'ai poursuivi mes études en passant un
DEA en acoustique à l'Ircam, à Paris. Je rêvais de vivre en Allemagne et j'y
suis donc repartie pour une première expérience professionnelle. J'ai été
embauchée chez STMicroelectronics à Munich
en 2000, comme ingénieure applications dans les systèmes de navigation. Je suis
revenue en France en 2010, toujours chez ST, à Rousset, comme ingénieure
architecte logiciel dans la sécurité.
"J'ai pu évoluer, changer d'équipe et gagner en
expertise"
J'ai dû faire mes preuves au démarrage, probablement
plus qu'une personne valide. Puis ma hiérarchie a compris ma valeur et le handicap n'a plus été un frein.
J'ai pu évoluer, changer d'équipe et gagner en expertise. Après 10 ans à mon
poste, j'ai décidé de changer. Je souhaitais faire autre chose et
l'environnement marketing dans lequel j'évoluais nécessitait une bonne
audition. J'ai donc envoyé une candidature spontanée à Rousset, et ce fut une
création de poste.
Comme aménagements techniques, j'utilise juste un
téléphone un peu spécial, avec une amplification importante, une bonne qualité
sonore et un adaptateur casque sur lequel je branche mes appareils. J'ai aussi
choisi un type de poste où la communication avec mes collègues peut aisément se
faire en face à face, ou par écrit, pour ne pas générer constamment des
difficultés de compréhension.
Je me considère bien intégrée, aussi bien dans le
monde du travail qu'au sein de mon équipe. Mais mon parcours n'a pas toujours
été aisé, et il faut sans cesse rappeler mes difficultés à mon entourage pour
qu'ils n'oublient pas de me regarder en me parlant pour que je puisse lire sur
les lèvres, par exemple. Une des spécificités des malentendants est que notre handicap ne se voit pas.
L'entourage a donc tendance à l'oublier. Le côté positif est que le
malentendant se sent accepté, mais il doit alors choisir: ne pas se manifester,
et faire des efforts surhumains pour compenser, ce qui est épuisant. Ou au
contraire, rappeler sans cesse son handicap...
La méconnaissance de certains handicaps conduit Ã
l'ignorance
D'une manière générale, je crois que les plus gros
obstacles à l'emploi des personnes handicapées
sont la méconnaissance et les préjugés qui conduisent à certaines aberrations,
comme de penser qu'elles ne peuvent pas accéder à la fin de leurs études à un CDI, ou qu'elles seront
plus absentes que d'autres
sans handicap.
La méconnaissance de certains handicaps conduit Ã
l'ignorance et au manque de considération. La personne handicapée est
contrainte de démontrer doublement sa motivation et la validité de ses
capacités. En ce qui concerne les personnes malentendantes, l'obstacle de
départ est celui des études, car il faut compenser la difficulté d'entendre le
cours par la lecture. Or tous les supports écrits n'existent pas toujours, et
ne suffisent pas.
De même, beaucoup de choses ont été faites dans les
grandes entreprises et administrations en matière d'accessibilité,
mais ce n'est pas suffisant. Il faut faire encore davantage pour tenir compte
des autres formes de handicaps. La semaine du handicap participe à la
communication et à mieux informer sur le handicap en général.
Ce n'est pas un
tabou, il faut briser les barrières et davantage sensibiliser les personnes
dans les équipes de travail, ainsi que les managers qui doivent certes
s'adapter, mais enrichissent également leur équipe d'une personne qui a
développé d'autres capacités pour compenser. A la fin, la compréhension et
l'échange permettent de faire tomber les barrières, les préjugés et la peur de
mal faire.
En savoir plus sur http://www.lexpress.fr/actualite/emploi-handicap_1300492.html?utm_content=buffera3ce8&utm_source=buffer&utm_medium=twitter&utm_campaign=Buffer#DTAV7FutUIUJP5HE.99
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